Si on voulait freiner les inscriptions au chômage, on ne s'y
prendrait pas autrement. Depuis la création de Pôle Emploi, cet
organisme né de la fusion entre l'ANPE et les ASSEDIC et qui devait
faciliter la vie des chômeurs, il n'est plus possible de
s'inscrire au guichet.
Les candidats à l'inscription sont renvoyés vers les
« services à distances ». Sous cette appellation sont
regroupés deux système :
- un serveur vocal, joignable en composant le numéro 3949
- le site internet de
Pôle Emploi
Commençons par le second. Il offre tout une séries de services, de
la recherche d'offres d'emploi avec possibilité de postuler en
ligne, à la simulation du calcul des allocations, en passant par
l'actualisation de son dossier en un ensemble très complet et somme
toute très efficace.
Sauf pour qui veut s'inscrire.
Un exemple très concret : le formulaire d'inscription en ligne
possède un champ obligatoire intitulé « numéro de sécurité
sociale ». La plupart des personnes n'ayant jamais travaillé
sont couverts par un parent ou par leur conjoint. N'ayant jamais
été immatriculés par la Sécu, ils donnent le numéro de la carte
Vitale dudit parent ou conjoint. D'ailleurs une icône représentant
une carte Vitale est située juste à côté du champ.
Un contrôle de cohérence avec leur propre date de naissance fait
que ce numéro n'est pas accepté. Mais plutôt que d'indiquer que ce
numéro n'est pas le bon, le serveur rejette le formulaire en entier
en prétextant une erreur technique et
conseille d'appeler le
3949. La solution : imaginer le début du numéro que la Sécu
attribuera par la suite. Une jeune femme née à Reims en juin 1990
devra ainsi rentrer le numéro 2900651454, les cinq derniers
chiffres étant le code INSEE de la ville de Reims.
Ainsi pour aller au bout de l'inscription par internet, le futur
inscrit devra :
- comprendre malgré les indications données qu'on lui demande un
numéro d'immatriculation qu'il n'a pas encore ;
- savoir comment sont forgés les numéros de sécu ;
- connaître ou savoir trouver le code INSEE de sa commune, ou de
son pays de naissance dans le cas où il est né à l'étranger ;
En ce qui concerne le 3949, beaucoup de choses ont déjà été dites,
et rarement en bien. S'inscrire par ce biais oblige à prononcer
clairement et distinctement le mot « inscription » au
moment voulu. Or si l'environnement est, même légèrement, bruyant
le serveur vocal ne reconnaît pas le mot attendu.
Par conséquent les demandeurs refoulés du guichet, ou ayant échoué
à s'inscrire sur les ordinateurs en libre service dans les locaux
de Pôle Emploi, utilisent le téléphone mis à leur disposition et
sont obligés de répèter plusieurs fois « inscription » à
une machine qui ne comprend rien pendant que d'autres attendent
leur tour.
En désespoir de cause, ils finissent par rentrer chez eux pour
réessayer au calme. Or
le numéro 3949 est surtaxé chez la
plupart des opérateurs téléphonique !
Faciliter la vie des demandeurs d'emploi ? On ne peut pas dire que
ce soit une réussite !
Par contre, pour se faire éjecter du chômage c'est très simple : il
suffit d'oublier une seule fois d'actualiser sa situation en fin de
mois. Plus radical encore : oublier de se rendre à une convocation.
Le résultat de ce dernier oubli est non seulement la radiation de
la liste des démandeurs d'emploi mais aussi l'interdiction de se
réinscrire pendant deux mois. Et là c'est automatique.
Lutte contre le chômage ou lutte contre les chômeurs ?